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"Agir en juif, c'est chaque fois un nouveau départ sur une ancienne route" Abraham Heschel

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Commentaire

Après la tuerie de Toulouse

March 27, 2012 12:

Paroles du Rabbi Neiger en soutien à la communauté juive de Toulouse,  ilvécu.

Ces mots ont été prononcés à Toulouse par Francine Neiger, lors de l'office de commémoration du 22 mars 2012.

Chers amis,

Vous êtes réunis ce soir à la suite d'une tragédie qui a frappé la France, Toulouse et la communauté juive. Sept personnes ont été assassinées avec une violence et une détermination inouïes, et parmi elles trois enfants.

Je regrette de ne pas avoir la possibilité d'être avec vous pour partager ce moment de douleur et de recueillement ; les images dans les media m'ont projeté au cœur de l'émotion que vous avez ressentie, quand j'ai reconnu ici une rue, ici un visage qui m'étaient familiers il y a quelques années.

Ce massacre perpétré par un homme seul nous met face à deux questions pour lesquelles nous restons sans réponses satisfaisantes :

Tout d'abord, comment un être humain peut-il rejeter sa propre humanité au point d'exécuter de sang-froid ceux qui partagent avec lui d'avoir été créés à l'image du divin, comment cette aliénation de soi-même peut-elle rendre possible le meurtre et l'acharnement sur un enfant ?

Et ensuite, pourquoi sommes-nous aussi souvent, en tant que Juifs, les cibles récurrentes, principales ou accessoires, de ces explosions de haine et de violence ?

Dans toutes les civilisations, le meurtre est universellement interdit comme il est interdit dans les dix commandements. Mais cette interdiction est avant tout un élément nécessaire pour la stabilité et l'ordre social, au même titre que l'interdiction du vol. Dans le Judaïsme, l'interdiction d'attenter à la vie humaine repose sur une prohibition bien plus symbolique et plus essentielle. Dans Génèse Rabba 34.14, Rabbi Akiva déclare que celui qui verse le sang humain, c'est comme si il avait défiguré l'image de Dieu Lui-même puisque l'être humain a été créé à Son image et à Sa ressemblance (Génèse 1.26). C'est ainsi que notre tradition consacre explicitement la vie humaine comme la réalité la plus sacrée de ce monde. La vie est sacrée au point que la quasi-totalité des commandements peuvent être ignorés pour épargner ou sauver une vie, c'est le principe de Pikouakh Nefesh.

Ainsi, c'est peut-être notre propre insistance sur la sanctification de la vie humaine qui nous place en opposition radicale avec ceux qui la méprisent au point de nier leur propre humanité. Notre stupéfaction dans l'horreur n'en est que plus extrême lorsque cette oblitération de l'humain et du divin cible des enfants ; aucune idéologie, même la plus haineuse et inacceptable ne devrait pouvoir rendre les enfants responsables de quoi que ce soit.

Ce soir la menace immédiate a disparu et nous pouvons nous recentrer sur la mémoire des victimes et la douleur de nos pertes. Je vous souhaite à tous Réfouat Hanefesh Hashelemah, une guérison complète de l'âme, en espérant que nos prières à la mémoire des victimes contribueront à faire de leur souvenir une source de bénédictions et à la réparation et la construction d'un peu de paix en ce monde, cette paix et cette sérénité que nous invoquons dans la plus simple des salutations, Shalom.

Rabbin Marc Neiger